La pomme verte de ma grand-mère

Deux ou trois heures de votre existence à perdre ? Essayer donc d'écrire les premières insanités qui vous passent par la tête sur un bout de papier...

NB : toute ressemblance de lieux, scènes, personnages ou contextes existant, ayant existé ou étant amenés à exister ne serait, bien entendu, que purement fortuite.

NB2 : vous seriez bien inspirés de ne pas prendre au sérieux un mot des écrits ci-dessous.


La pomme verte de ma grand-mère



Des voix dans le couloir. Qui s'approchent. Ainsi que les pieds qui les accompagnent.

"Il paraît qu'il va neiger cette nuit."
Sylvain.
"Trop la classe. Ma grand-mère a mangé une pomme verte hier."
Tamara, l'air concerné, le ton surexcité.

Chicanage quand tu nous tiens. Ou chipotage, peut-être. Probablement aucun des deux.
"Non mais sérieux ! On est en alerte orange pour 48 heures ! Je ne sais..."

Les pieds se font plus discrets. Et les voix s'évanouissent.

Mon attention se concentre à nouveau sur l'écran face à moi. Ou, plus exactement, j'essaie de m'en persuader. Ou convaincre. Tout dépend des jours et de la nature des arguments. Mais à quoi bon ? A rien, je n'arrive, au-delà de parcimonieuses et fugaces avancées. Pour( )quoi me suis-je convaincu que mon avenir passait par des cases chiffrées de tableaux transmis par des sociétés offrant refuge à de pauvres démunis thons rouges abandonnés accueillant avec une joie inouïe la morsure du harpon moderne qui achève sa bien terne existence dans un sombre recoin d'un vaste, monotone, bleu, morne océan ? Ni éthique, ni intéressant, ni gratifiant. Sauf si, ton grand truc, c'est de participer à des massacres de poissons auxquels gîte étanche dans des récipients métalliques on offrira.

Le thon, ce n'est pas bon. Rien de comparable avec la pomme verte que ma grand-mère a mangée hier.



Verte, elle n'était plus guère. Elle trônait, encerclée par un mince filet de coulis de cassis, kumquat et groseilles blanches, au centre d'une assiette plate en or massif, sa robe, dorée, et quelque peu fripée, par son bref passage au four, imbibée de rhum antillais.

Délicatement installée sur son fauteuil plusieurs fois centenaire, Viviane, toute de noir vêtue, à l'exception de quelques modestes ornements, remercia d'un bref, et sec, signe de tête, son cuisinier qui, subrepticement, s'esquiva, en compagnie du grand chambellan. qui s'en allait superviser la fermeture des volets du manoir et les menus détails du périple mercurial. Éviter la neige orange serait primordial pour préserver l'humeur de la dame.

De ses couverts elle se saisit et de découper son dessert elle entreprit, ses pensées tournées vers le vernissage de l'exposition de chaussettes d'Elvis, au cœur de sa villa napolitaine, dès l'atterrissage de son jet breton...



Mauvais cliché, désolé !
On rembobine et c'est reparti pour un tour.



Verte, elle est encore. Déposée amoureusement au centre de l'assemblée agenouillée entassée entre les quatre murs à la douteuse verticalité. Séparée du sol de terre par une simple épaisseur de papier souillé. Pas vraiment mûre, déjà légèrement passée. Éclairée par tous les regards, nourrie par toutes les âmes.

Un chant s'élève, danse, pirouette, résonne, se noie dans son aride écho. La cadette des cadettes, s'avance dans le silence retombé. Respectueusement, de ses deux mains, elle emprisonne l'offrande et, se mouvant vers la doyenne des doyennes, la lui présente. Cela fait mille cinquante-six mois qu'elle arpente cette Terre.

Elle plante ses dents. Elle savoure lentement le doux sucré du fruit.



Encore raté, navré !
Un essai supplémentaire ?



Verte, elle fut. Il y a quelques mois. Avant d'arriver à maturité, et de se parer d'une flamboyante parure rouge et jaune. Irrégulière, ignorée par les fongicides, elle était en train de songer à se parer de sa branche. Le suicide est une pratique répandue chez les pommes sauvages.

D'un geste expert, elle est calmement dissocié de l'arbre qui l'a portée pendant quelques mois et avant elle sa fleur. Dans le panier, elle rejoint une grappe de muscat, une grappe de chasselas, une tomate aux proportions astronomiques et quelques figues violettes, déambulations dans le potager après déambulations dans le potager.

Tous finiront lacérés, marinés. Et mère-grand appréciera sa salade de fruits frais.



C'est déjà un peu mieux.
Et sinon, ce test du khi-deux ?

1 commentaire:

  1. Wouhou, de la lecture ! :D
    (J'ai déjà dit que j'aimais beaucoup ce que tu écrivais ?)

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